La chambre d'Elendra

Lavania avait laissé le temps à Elendra de se calmer un peu, désirant lui parler lorsque celle-ci aurait digéré la nouvelle et qu'elle serait ouverte à la discussion. Elle avait donc attendu que le silence règne dans la chambre où la petite s'était réfugiée.

La jeune mère frappa à la porte, l'entrouvrit et passa la tête dans la chambre de sa puce qui était étendue sur son lit ne la regardant même pas. Doucement, elle entra dans la chambre, refermant la porte derrière elle.

Elle prit place sur le lit, posant une main délicate sur la tête de sa fille, caressant doucement ses cheveux, gardant le silence pendant un moment.

Tu sais ma puce... Notre but c'est pas de t'embêter... commença-t-elle prudente, elle avait bien vu sa fille pousser Zeiss tout à l'heure et ne désirait pas vraiment avoir droit au même traitement.

Tu peux penser que c'est chouette d'être noble et de faire comme les grandes Dames... Mais vraiment c'est pas si amusant que ça tu sais... Et les jolies robes coutent cher. Et souvent quand tu es noble, tu ne peux pas faire tout ce que tu veux...

Il faut que tu respectent beaucoup de règles... Et souvent il faut que tu fasses des choses qui ne te plaisent pas du tout. Comme promettre des choses que tu ne penses pas vraiment... juste pour garder tes terres.

C'était horrible de dire ça et Lavania avait parfois honte de ce qu'elle avait dû faire depuis qu'elle avait été anoblie, espérant parfois rendre son fief. Cependant, elle en avait tellement rêvée qu'elle s'accommodait de ces petits désavantages.

Et surtout, les nobles ne peuvent pas marier qui ils veulent... ajouta-t-elle en lui caressant doucement les cheveux.

Luisa par exemple, ce sera sûrement ses parents qui vont choisir qui elle va devoir marier. Et peut-être qu'elle ne l'aimera même pas...

Et tu sais, la noblesse c'est pas ça qui rend les gens heureux ou gentil...

Tu sais, papa et moi quand on s'est marié sur nos bans de mariages c'était écrit: Lavania forgeron et cultivatrice de blé et Zeiss éleveur de cochons. Et on a eu un très joli mariage et pleins de beaux enfants et on a toujours été très heureux même si on était pas noble, tu sais.

Et toi aussi tu es née petite gueuse tu sais. Et papa a peur qu'à Saint-Louis ils t'enseignent que les gueux c'est dégoutant et inférieur aux nobles. Et nous on veut que tu saches qu'on ne pense pas que c'est le cas...

La jeune mère était un peu maladroite et mal à l'aise surtout, sachant que si quelqu'un l'entendait dire ça, elle se ferait rudement taper sur les doigts.

Tu sais, je voulais que tu ailles à ce collège... Mais maintenant je partage un peu l'avis de papa. ajouta-t-elle pas certaine qu'elle devait vraiment dire cela, après tout ils avaient pris une décision ensemble et elle ne devait pas contredire celle-ci!

Mais... Tu sais, les parents peuvent se tromper...

La jeune femme s'avançait sur un terrain glissant et tentait de peser ses mots, ne désirant pas que son mari découvre ce qu'elle s'apprêtait à faire, car c'était certain qu'elle se ferait engueuler comme jamais!

Si jamais, tu t'intéresses à la noblesse... Je te considère de bien réfléchir par contre, car les conséquences pourraient être très graves pour toi... Mais si jamais tu choisis de n'en faire qu'à ta tête... Je jetterais un coup d'oeil dans le bureau de ma chambre, peut-être que ça pourra t'aider.

La jeune mère plongea alors son regard dans celui de sa fille.

Si quelqu'un te demande... Je ne t'ai jamais rien dit!

Joyeux anniversaire en avance ma puce. finit-elle par lui dire en posant un baiser sur son front, la serrant contre elle.

Elle l'aimait sa grande fille, elle était unique et avait bien du mal à se montrer autoritaire avec elle, voire même avec tout ses enfants, ce qui était un peu ridicule considérant que plusieurs Lorrains la surnommait l'autoritaire, alors que ses propres enfants devait se mourir de rire en entendant un tel surnom. Leur mère autoritaire?! Ben voyons!

Cela faisait un moment que je regardais par la fenêtre, tristounette de ne pas pouvoir aller à Saint-Louis, mais aussi en pleine réflexion de la façon dont j'allais pouvoir me procurer les parchemins dont j'avais besoin.

Pour la lettre de la maman de Luisa ce serait facile! Luisa va sûrement m'aider en plus. Je vais même commencer par ça. Je vais écrire à Liz pour avoir une lettre et voilà!

Après je vais écrire une lettre au recteur pour lui dire que je veux aller à Saint-Louis, ça aussi c'est facile. Même que je vais pouvoir faire ça en même temps que d'écrire à la maman de Luisa.

Ensuite je vais devoir trouver le permis de couronne de maman... Ça ça va être plus compliqué... Parce que je sais pas elle le cache où! Et depuis que maman est malade elle est touuujouuurs à la maison! Avant elle partait toujours au Castel, mais là... Elle fait que me surveiller tout le temps! Ça devient un peu énervant même...

Et puis l'arbre généralogique, ça ça va être super dure! Parce que moi je sais même pas à quoi ça ressemble... Et puis je sais pas si maman elle a ça à la maison! Il va peut-être même falloir que j'aille voir les autres d'Acoma dans l'autre château plus loin et ça ça va être long! Et puis en plus je sais même pas où c'est vraiment ni à qui parler...

Je méditais donc sur tous ces nouveaux obstacles pour mon entrée à l'école lorsque ma maman toqua à la porte, pour ensuite venir s'asseoir sur mon lit près de moi.

Mais moi je ne voulais pas parler à maman, parce que elle non plus elle voulait pas que j'aille à Saint-Louis et j'étais fâché contre elle aussi! Donc moi je boude et je continue de regarder par la fenêtre en l'ignorant complètement. (Même si j'écoute un peu ce qu'elle dit.)

Maman me parle des nobles, mais je suis sure que ce qu'elle dit est même pas vrai, c'est juste pour me convaincre de pas aller au collège de France, mais soudain, elle se met à parler de mon amie à moi, Luisa. Elle dit que c'est ses parents qui vont décider avec qui elle va se marier!

Moi je connais pas grand chose au mariage et je suis même pas sure encore que je vais me marier. Et les garçon c'est un peu nul des fois, même si j'en connais pas beaucoup, je le sais que les garçons c'est nuls, toutes les filles le disent alors ça doit être vrai, t'sais.

Je me retourne alors et regarde ma maman, sans dire un mot.

Elle me parle alors de leur bans de mariage. Je pouffe de rire.

Éleveur de cochons!

La leçon de moral de maman est un peu ennuyante (sauf la partie où elle parle que papa était éleveur de cochons!), mais je l'écoute quand même, elle me fait un petit peu sourire, même si je suis fâchée.

Puis, contre toute attente:

Mais... Tu sais, les parents peuvent se tromper...

Si jamais, tu t'intéresses à la noblesse... Je te considère de bien réfléchir par contre, car les conséquences pourraient être très graves pour toi... Mais si jamais tu choisis de n'en faire qu'à ta tête... Je jetterais un coup d'oeil dans le bureau de ma chambre, peut-être que ça pourra t'aider.

Je la regarde un instant. Vient-elle de me dire où je vais pouvoir trouver tous les parchemins dont j'ai besoin pour mon inscription? Je pense bien que oui...

Alors je souris! Elle m'a dit de réfléchir comme il faut, mais moi je sais que j'en ai pas besoin! Je veux aller à Saint-Louis comme Luisa un point c'est tout.

Si quelqu'un te demande... Je ne t'ai jamais rien dit!

Promis! Rien de rien! lui répondis-je en rigolant.

Je fais alors un gros câlin à maman. C'est la plus gentille. Plus gentille que papa même!

Merci maman! Et puis tu sais, papa il a dit que ils vont me refuser à Saint-Louis, mais moi je vais pas y aller si j'ai pas reçu une lettre pour me dire si je suis acceptée ou non! Parce que Luisa a envoyée un courrier et ils lui ont répondu qu'elle pouvait y aller! T'sais papa il connait rien aux trucs de nobles. Pas vrai hein?

Je souris à maman trop contente! Tantôt, ou peut-être demain quand papa sera parti, moi je vais aller fouiller dans le bureau de maman et trouver tout ce que j'ai besoin et envoyer tout ça au Recteur et moi bientôt je vais pouvoir aller à Saint-Louis et me faire pleins de nouveaux amis!